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Covid-19 et accueil individuel : au coeur de la crise

Covid-19 assistante maternelle
Publié le 07/09/2020
Laetitia Delhon
Journaliste spécialisée dans le travail social et médico-social, la petite enfance et le handicap
Infirmière puéricultrice puis directrice de crèche, Louise Levesque était en stage au sein de la DGCS pendant le confinement. Dans un rapport achevé en juillet 2020 elle raconte la gestion de la crise sanitaire, ses conséquences pour l’accueil individuel et interroge son impact sur l’attractivité de la profession

Le rapport propose d’abord une plongée au jour le jour dans la gestion de la crise sanitaire par l’administration centrale, la Direction générale des affaires sociales (DGCS). A crise inédite, gestion inédite : sous la pression des fédérations et syndicats face à la cacophonie dans les territoires, la DGCS s’aperçoit de la nécessité d’organiser des réunions hebdomadaires avec ces représentants. Elles deviennent le lieu où les difficultés parfois ahurissantes - notamment la dichotomie entre ce que dit le ministère des Solidarités et de la Santé et ce que font les Départements – s’expriment.
 

Réactions différentes

Après l’urgence, lors de la neuvième visioconférence organisée par la DGCS, les partenaires sociaux et associatifs décrivent l’existence de deux groupes d’assistantes maternelles depuis le début de la crise. « Un groupe de professionnelles qui travaillent dans la peur, mais qui montrent un grand dévouement dans l'entretien et le respect des recommandations sanitaires. Un second groupe constitué d’assistantes maternelles qui, à l’inverse, sont moins rigoureuses vis-à-vis des consignes sanitaires et qui prennent de la distance de manière à se préserver. En effet ces mesures ont tendance à épuiser les professionnelles ».
 

Fatigue et colère

La crise s’installe et les difficultés « liées à leurs conditions d’emploi entraînent chez les professionnelles stress, agressivité et colère, que ressentent les associations et organisations syndicales, qui ne savent plus comment contenir les interrogations constantes des professionnelles ».

Manque d’accompagnement

Louise Levesque relate ensuite le manque d’accompagnement par les services de Protection maternelle et infantile (PMI), plus ou moins fort selon les territoires, et l’impact des recommandations contradictoires entre le gouvernement et les départements. « Cette crise a mis en lumière les constats préexistants de la profession d'assistante maternelle et a exacerbé ses difficultés » relève l’auteure, qui liste dix points d’alerte.
 

Points d’alerte

Ainsi, la crise sanitaire a « accru la complexité administrative du métier, augmenté le sentiment d’isolement des assistantes maternelles, mis en péril leur survie économique, détérioré parfois la relation avec les parents- employeurs, accentué les attendus à leur égard et leurs responsabilités, mis un terme temporairement à leur possibilité de professionnalisation qui est un levier important de leur légitimation, elle a enfin renforcé le sentiment de pénibilité au travail et dans certains cas, fait émerger un manque de sens suffisamment important pour inciter les professionnelles à cesser leur activité ».
 

Des bénéfices ?

Dès lors, est-il possible de « tirer parti » de ces constats pour renforcer l’attractivité du métier s’interroge l’auteure ? Deux hypothèses contradictoires :

- Oui, au regard de la forte mobilisation des professionnelles, de l’engagement de leurs représentants et de leur prise en considération plus importante par les organes d’État – DGCS, gouvernement, CNAF, etc.

- Non, au regard de l’épuisement de la profession après cette crise, de ses conséquences potentielles sur leur emploi, des tensions accrues avec la PMI et d’un sentiment de colère.
 

Le pari de l’attractivité

En synthèse, l’auteure suggère que la crise a pu renforcer la professionnalisation des assistantes maternelles, du fait de leur réactivité et de leur adaptation en pleine autonomie à de nouvelles conditions d’exercice. Par ailleurs, l’écho médiatique de leurs difficultés, à l’heure où la réforme des modes d’accueil (loi ASAP) va revenir sur la table des discussions politiques, pourrait selon elle être propice à des mesures renforçant l’attractivité.

« La conjoncture semble donc plutôt favorable et nous saurons dans les mois prochains si leurs difficultés ont été mises « sous le tapis » ou non par les autorités publiques » souligne-t-elle.
 

Six leviers, 18 mesures

L’auteure dégage enfin six leviers « pouvant servir de base à la redéfinition du métier d’assistante maternelle » :

- La lisibilité de l’information

- La lisibilité de leur statut

- La survie économique en facilitant l’accès à ce mode d’accueil

- L’accompagnement,

- La professionnalisation

- Le sentiment d’appartenance.

Dix-huit mesures sont associées à ces leviers, parmi lesquelles l’instauration d’une auto-évaluation annuelle à transmettre à la PMI, la tenue de réunions pluriannuelles entre la PMI et assistantes maternelles, et la reconnaissance du rôle de « gestionnaire de mode d’accueil » dans la relation avec le parent-employeur.



Nous reviendrons en détails sur les informations contenues dans ce rapport dans le prochain numéro de L’assmat.

► Rapport, Les assistant(e)s maternel(le)s face au défi de l’accueil des enfants au temps de la Covid-19. Ou comment relancer l’attractivité du métier d’assistant(e) maternel(le) à l’aune de la crise sanitaire ? Louise Levesque, Juillet 2020.