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Inégalités sociales d’accès aux modes d’accueil : la France, mauvaise élève de l’Europe

accueil de la petite enfance en Europe
Publié le 20/02/2019
Ces mauvais résultats sont liés au reste-à-charge plus important dans l’accueil individuel, et aux critères d’attributions des crèches donnant priorité aux couples bi-actifs.

L’accès aux modes d’accueils représente un enjeu majeur de lutte contre les inégalités sociales et leur reproduction. C’est l’un des objectifs de la stratégie de lutte contre la pauvreté des enfants, qui doit aboutir prochainement à la création d’un référentiel éducatif de la petite enfance pour la qualité d’accueil, élaboré sous l’égide du Haut conseil des familles, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) et au déploiement d’un plan de formation continue des 600 000 professionnels de l’accueil du jeune enfant.

En la matière, parmi ses voisins européens, la France fait-elle figure de si mauvaise élève ? Oui, selon une étude comparative réalisée par Catherine Collombet et publiée par la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) courant 2018. La proportion d’enfants de moins de trois ans en mode d’accueil formel y est de 68 % pour les 20 % des ménages les plus riches, contre 9 % pour les 20 % des ménages les plus pauvres, « soit un écart de quasiment 1 à 8 ». Mais cet écart est encore plus important pour les assistantes maternelles, allant de 1 à 12.

Si le recours aux modes d’accueil apparait plus égalitaire dans les pays largement couverts comme la Suède, le Danemark, la Finlande, la Belgique et la Slovénie, la France fait partie de ceux dont les niveau des inégalités reste le plus élevé malgré un bon taux de couverture. Un travail statistique récent (2017), montre même que « la France affiche le niveau d’inégalités le plus élevé de l’Union européenne ».

L’étude montre que si le reste-à-charge des ménages est très variable selon les pays, le statut d’emploi et la catégorie socioprofessionnelle des parents sont déterminants. Mais pourquoi, malgré un niveau de reste à charge légèrement inférieur à la moyenne européenne, et une offre publique d’accueil largement subventionnée, les inégalités sont-elles donc si fortes en France ? L’étude avance trois hypothèses :

  • le recours élevé aux assistantes maternelles, où le reste à charge est plus élevé pour les familles que dans l’accueil collectif.
  • les critères d’attribution des places en crèche tendant à donner la priorité aux enfants dont les deux parents travaillent
  • la demande précoce de place d’accueil des familles bi-actives : l’ancienneté de la demande constituant un critère d’attribution.

L’étude se concentre ensuite sur quatre pays étrangers, notamment la Norvège et la Belgique. Dans les deux cas, malgré un système universel d’accès aux modes d’accueil pour le premier, de lutte contre les inégalités similaires à ce qui est développé en France pour le deuxième, les familles plus vulnérables socialement accèdent toujours plus difficilement aux modes d’accueil.

Priorités d’accès pour les familles défavorisées ou développement large de l’offre d’accueil : « la lutte contre les inégalités n’est pas aisée » conclut Catherine Collombet.

► Catherine Collombet, Les inégalités sociales d’accès aux modes d’accueil des jeunes enfants, Une comparaison européenne, Revue des politiques sociales et familiales, n°127, Deuxième trimestre 2018, CNAF